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25 novembre 2005 5 25 /11 /novembre /2005 09:14

En cette période de fin d’année propice à l’organisation de vacances bien méritées, quoi de plus approprié que cet arrêt rendu le 2 novembre 2005 (n°03-14862) par la Cour de Cassation à propos de la responsabilité des agences de voyages.

La matière est gouvernée par l’article 23 de la loi du 13 juillet 1992.

Selon ce texte, l’agence de voyages est responsable de plein droit à l’égard de son client en cas de mauvaise exécution d’une obligation prévue au contrat, y compris si cette inexécution n’est pas commise par l’agence elle-même mais par un prestataire de services qu’elle s’est substitué.

Une véritable présomption de responsabilité est donc posée à l’encontre de l’agence de voyage dès lors qu’une prestation quelconque du contrat n’est pas conforme à ce qui était prévu.

Ce mécanisme protecteur a été mis en place par le législateur dans le souci de favoriser l’indemnisation des acheteurs de voyages et de séjours à l’étranger.

Il est en effet plus simple et efficace de saisir le juge d’une action en responsabilité contre son agence de voyage en France que d’aller engager une procédure à l’autre bout du monde contre, par exemple, le transporteur étranger qui a égaré vos bagages.

Comme le texte le précise, il s’agit d’une responsabilité de plein droit : dès lors que le contrat n’est pas correctement exécuté par un prestataire local, le client est en droit de demander la réparation de son préjudice à l’agence de voyage.

Celle-ci ne peut s’exonérer que dans les conditions prévues limitativement par la loi, à savoir, en rapportant la preuve que la mauvaise exécution du contrat est imputable :

- soit au client,

- soit au fait imprévisible et insurmontable d’un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat,

- soit à un cas de force majeure.

Enfin, en cas de condamnation à l’égard de son client, l’agence de voyages pourra bien évidemment se retourner contre le prestataire de services fautif.

C’est sur la base de ce dispositif légal qu’une personne ayant vu ses vacances en Andorre se terminer par une malencontreuse chute dans les escaliers de l’hôtel où elle résidait, a eu la bonne idée d’assigner son agence de voyages en réparation du préjudice causé par cet accident.

Les juges du fond l’ont débouté de sa demande au motif que les circonstances n’étaient pas de nature à engager la responsabilité de l’hôtel, et donc pas davantage celle de l’agence de voyage.

Cette décision est cependant cassée par la Cour de Cassation pour violation de l’article 23 de la loi du 13 juillet 1992 :

« Qu’en statuant par ces motifs alors que l’agence de voyage, responsable de plein droit de l’exécution des obligations résultant du contrat, n’établissait ni la faute de la victime, ni le fait imprévisible et irrésistible d’un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, ni un cas de force majeure, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »

Cet arrêt de la Haute Juridiction est pour le moins incompréhensible.

Il revient à engager la responsabilité de l’agence de voyage alors que la responsabilité de son prestataire n’est quant à elle pas établie !

Cette interprétation inique est en outre contraire à la lettre de l’article 23 de la loi, qui rend responsable l’agence en cas d’inexécution des prestations convenues. Il faut donc bien, pour que la responsabilité puisse être retenue, qu’il y ait manquement au contrat, soit de l’agence directement, soit de ses prestataires.

Avant de rechercher si l’agence de voyages peut invoquer une des clauses exonératoires de responsabilité prévue par la loi, encore faut-il s’assurer que les conditions de cette responsabilité sont réunies.

Or, dans l’affaire de la chute dans les escaliers soumise à la Cour, l’hôtel n’a pas manqué à son obligation de sécurité de moyen. Il n’y a eu aucune inexécution du contrat et pourtant la responsabilité de l’agence est retenue.

La situation est d’autant plus absurde que l’agence ne pourra pas se retourner efficacement contre l’hôtel puisque ce dernier n’a pas commis de faute...

Le droit actuel facilite l’indemnisation des victimes et cela est juste.

En revanche, il ne faut pas que cela débouche sur des procédures « à l’américaine » où le justiciable est totalement déresponsabilisé.

Il y va de la crédibilité du droit et des juges…

(Publié le 25/11/05 par Pierre FERNANDEZ, Avocat à la Cour)


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commentaires

L
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G
Le demandeur s'est blessé : il y a donc manifestement inexécution du contrat. La décision parait donc parfaitement compréhensible
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B
Bonjour,J'aurais souhaité connaître les obligations des agences de voyage quant aux informations sur les risques induis à certains pays étrangers.Dans quels cas, ce défaut d'information peut donner droit à une annulation et un remboursement intégral du voyage?Merci
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P
A notre connaissance il n'y a pas d'obligation particulière en la matière, si ce n'est l'obligation d'information et de conseil qui pèse sur tout vendeur ou prestataire de service.La sanction peut être la nullité du contrat et donc le remboursement du client à condition que celui-ci démontre qu'il n'aurait pas choisi le voyage s'il avait eu connaissance des risques liés à la destination vendue.Si les risques n'apparaissent que postérieurement à la souscription du voyage alors il convient de se référer aux conditions générales de vente du voyagiste pour voir sous quelles conditions l'annulation du voyage peut être réalisée. La plupart des conditions générales prévoient qu'une partie du prix peut être perdue spécialement pour les annulations à une date proche du départ.Sauf si les risques en question remplissent les conditions de la force majeure : dans ce cas, le client peut récupérer l'intégralité des sommes versées.